UN MEURTRE A BUSQUE EN  1788



Il est parfois difficile de trouver des témoins sous l’Ancien Régime (et ensuite aussi)
La solidarité des communautés être brisée, surtout quand un crime ou un délit se passe à a l’intérieur d’une communauté Plus exactement il y a beaucoup de témoins qui  disent beaucoup de choses mais pas toujours ce qu’on attend. Ils ne voient rien, n’entendent rien sauf si il y avait du monde (ils ne peuvent pas nier).
Il y aussi la peur des représailles même en cas de crimes qui est condamné par tous
Nous allons voir une affaire sans témoins et comment la Justice va réussir à en trouver.


L’affaire


Le 1 janvier 1788 JP RAYNAUD dit Marragou de la Fontié (Busque, près de Graulhet) part de sa maison pour aller à Busque. On le retrouve mort le lendemain vers 2h de l’après-midi dans le bois de la Courbe


Louis AURIOL 58 ans consul de Busque habitant à Vaissière
A une heure de l’après-midi, il chauffait son four un enfant, le fils cadet de la veuve BARTHE est venu le trouver dire qu’on avait trouvé un homme mort au bois de la Courbe, il a quitté son fournil et s’est rendu sur les lieux.
Il trouve le corps et va faire chercher  le juge qui est à l’abbaye de Candeil ce jour-là,  par  Jean Baptiste VERDIER 33 ans valet consulaire de Busque et Joseph CALMETTES laboureur de Vaissière

 Le juge accourt. Il fait chercher par Verdier à Graulhet le greffier Bonnet et Sabatier le chirurgien.
Bonnet et Sabatier ont des problèmes, ils ne peuvent franchir la rivière par barque, ils reviennent sur leurs pas pour passer la rivière à la Bressolle. Sabatier rebrousse chemin, son cheval est tombé, l’état des chemins, la pluie, l’obscurité…

VERDIER a peur…

Tout le monde se retrouve à la nuit dans le bois de la Courbe sur le chemin qui va de la Fontié à Busque au lieu appelé le terme de la Borie près du bois du sr Gaurel  de Briatexte et d’une bruyère de Marie BRU de Vayssière

On examine le corps .
Le corps est couché face contre terre, vêtu d’un habit vert et d’une culotte de serge grise, des guêtres, un chapeau. Un sabot au pied gauche et l’autre sur sa tête
Dans sa poche  58 pièces d’un sol, 22 pièces de 2 livres, 43 pièces d’un liard.
Il a reçu de nombreux coups :…
Un coup sur la partie gauche, l’œil écrasé, les os cassés, un coup sur l’œil droit et un coup sur la lèvre et un quatrième sur le bras gauche.
 L’ayant retourné, on  demande si quelqu’un connaît la victime, personne ne dit rien , le juge reconnaît JP Raynaud. Les assistants à leur tour le reconnaissent. Son frère Jean RAYNAUD s’approche et reconnaît lui aussi son frère Il fait sombre, il pleut, la rivière est infranchissable
Personne ne veut garder le corps en « un lieu si affreux » Le juge ordonne à J RAYNAUD d’emporter le corps de son frère chez lui. Il va chercher sa charrette et emporte le corps

.
L’autopsie

2 et  3 janvier le corps est examiné par Sabatier
plaie sur le coronal qui est écrasé
nez écrasé
plaie à la joue jusqu’à l’os
plaies aux pomettes
orbite écrasée
main droite : plaie en lambeaux sur le métacarpe, os écrasés
tibias et péronés fracturés
etc..
conclusion : instrument obtus ou contandant style pierres, bâtons ou autres
Il prend 30 livres

Le 3 janvier on décide d’inhumer la victime et le 4 l’ordre est donné au curé de Busque de l’enterrer.


L’enquête


Jean Raynaud son frère porte plainte le 7 janvier, il réclame vengeance


Le 10 janvier on décide d’appeler des témoins Le 11 janvier une enquête est lancée par la justice de Graulhet.
Quelques témoins comparaissent, ceux qui ont découvert le corps et la dernière personne à avoir vu Raynaud :

Jean Baptiste VERDIER valet consulaire, il  dit que la victime est venue vers 4 heures se faire raser et est repartie vers le coucher du soleil et a pris le chemin de la Fontié

Pierre VAISSIERE  54 ans second consul de Busque : il déclare qu’un des fils cadets d’Auriol est venu le chercher vers deux heures chez lui

Marianne PAPAIS  42 ans femme de Barthélémy MASSOUTIER :
Le deux janvier, elle est partie de la Fontié  avec Margueriye MANENS métayère de la Borie Basse vers midi ou une heure de l’après-midi elle trouve un corps mort et ensanglanté dans le bois de la Fontié. Effrayées elles passent leur chemin, elles tombent sur Marie BRU, elles lui disent de ne pas aller plus loin. Marie BRU rameute du monde mais elle et sa compagne continuent leur chemin

Marguerite MANENS 45 ans epouse de Pierre DESPLATS de la Borie basse
Elle dit  la même chose mais ajoute que le soir du premier de l’an étant chez son beau frère à la Fontié le berger et le valet de GUITARD vinrent vers les  huit heures et le berger dit qu’il y avait beaucoup de train du côté de la ,maison de Marragou, il avait entendu quelqu’un qui disait qu’ »il voulait se séparer le lendemain »

On s’interroge sur les motifs du meurtre…

Ce n’est pas l’argent (la victime avait encore sur elle unegrosse somme), violence particulière (Règlement de compte ?)
Aucun élément permettant d’élucide cette affaire, le 13 mars 1788 il est décidé d’en venir à l‘arme ultime de cette époque : le monitoire


Le monitoire



Le 26 mars demandé est faite à l’évêque de Castres, le 2 avril réponse favorable avec liste des paroisses concernées
Le 22 avril m^me demande à l’évêque d’Albi avec réponse favorable immédiatement.


Les curés vont donc au cours de la messe lancer un appel à témoins, menaçant d’excommunication ceux qui savent et se taisent.



Résultats

Les réponse affluent ! Des lettres provenant de 5 paroisses, en août et septembre. Ces paroisses sont :
Ste Cécile de Maurival à Puybégon
ND des Vignes à Graulhet
Graulhet
St Pierre de Rouzedes (Busque)
St laurent de Bougros (peyrole)


Elles contiennent les dépositions de 15 personnes
Afin de mieux comprendre la situation, j’ai affecté un numéro à chaque témoin. Ces numéros seront repris pour la synthèses des révélations (toute faites sous le sceau du secret en confession)
 

Graulhet 3 aout
Anette THOMAS de Graulhet 28 ans  1

Mauribal  10 et 11 aout
Jean GUITARD de la Fontié 28 ans (2)
Antoine MILLET 19 ans de Graulhet ancien domestique du précédent  (3)
Antoine MALRIC de gaubert 16 ans ancien domestique du précédent (3bis)
Louis MILLET ménager de la Fontié 28 ans  (4)
Jeanne GARRIGUES veuve d’Antoine ROUDET de Cayrecoumbe 50 ans servante chez GUITARD de la Fontié  (5)
Marie MALARET 18 ans servante cehz Louis MILLET (5bis)
marie MALET métayère à la Fontié  (6)
Marianne RODIERE 50 ans  femme de jacques GUITARD de la Fontié  (7)

ND des Vignes 3 aout
Marianne PAPAIS épouse de Barthélémy MASSOUTIER métayer de M° Besse (voir plus haut)  (8)

St laurent de Bosgros 3 aout
marianne POUJADE 20 ans bergère de Pierre DAYDE de St laurent de Biau (9)
Joseph GALINIER 30 ans fils de'Antoine de la Bousaquié  (10)
jacques ROUYRE 25 ans domestique chez Pierre DAYDE (11)
Guillaume RODIER 34 ans fils de Pierre ménager du Pilié  (12)

St Pierre de Rouzede 28 aout
Catherine MAZENS 53 ans femme de Bernard ESCRIVE ménager de la Trivalle (13)



Que disent-elles ?

Beaucoup de choses pour certaines,  pour d’autres  rien de plus (des ragots ou des informations de seconde main)
Mais des révélations très intéressantes car même si on se tait devant la justice, on parle beaucoup en famille


Synthèse des révélations


J’ai entendu dire par un charpentier chez Mlle de Bonsirven qu’un homme s’était vanté pour un louis d’or de dire qui avait fait le coup (1)


Le nommé Magagne donnerait le nom du coupable pour 6 livres (10)

Dans un cabaret de Puybégon, le nommé Drulhe du Fédié paroisse de St Maurice lui a  dit que contre 4 Louis il donnait le nom du coupable (12)

Un voisin a entendu la veille de l’assassinat  chez Jean Pierre Raynaud un grand bruit causé par des personnes en colère. N’a distingué que la voix de Marianne  RAYNAUD  nièce du mort (2)

Un autre a entendu de violentes querelles chez RAYNAUD aux environs de  neuf heures du soir
Ca arrivait souvent et il fallait intervenir pour séparer les gens (3) et (3bis)

Jean Pierre Raynaud se vantait que son frère menaçait de le tuer (4) (5)

Jean Pierre Raynaud disait que les siens voulaient le tuer (5bis)

La veille de l’assassinat on a vu Jean Pierre Raynaud entrer et sortir de chez lui comme un homme fort triste et qui ne sait où donner de la tête (5)

La veille Jean Pierre Raynaud est venu chez une voisine en pleurant que son frère voulait le tuer (7)

Quelques jours avant sa mort Jean Pierre Raynaud est venu dire que les siens voulaient le tuer (6)

Un valet qui passait  par là a dit que la veille en passant près des R il y avait un bruit terrible comme si tous voulaient se tuer (8)

Jean Pierre Raynaud venait souvent se réfugier chez témoins disant que son frère ‘avait battu
Surprenant la veille du premier janvier Jean Pierre Raynaud avait émis l’intention d’aller à busque se faire raser et d’aller à Vêpres (ce qui était inhabituel) les siens l’en avaient engagé (pas de vêpres normalement) (13)


Un homme  de Busque posté  derrière un arbre dans la  forêt a vu  le meurtre commis par Jean Pierre Raynaud son frère et Antoine PARAYRE son beau frère (9)


Un domestique a dit que le jour de la disparition Jean Pierre Raynaud demande à sa femme « où est mon frère ? » elle lui répond qu’il a  été se faire raser à Busque. Quelques heures après on a vu publiquement Jean Pierre Raynaud prendre le chemin de l Courbe avec une pioche (11)



Comment s’est finie l’affaire ?


Probablement renvoyée à une juridiction plus compétente, à Toulouse mais là une grande partie des archives ne sont pas encore classées.

Mais ça ressortira un jour